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Suspension de l’aide américaine : une catastrophe humanitaire

29.04.2025

L’élection de Donald Trump à la présidentielle américaine a porté un coup fatal à l’action humanitaire. En moins de trois mois, la nouvelle administration en place a suspendu plus de 80% des financements de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), plus grand bailleur de fonds humanitaires au monde qui représentait plus de 40 % de l'aide mondiale en 2024. À cette décision brutale s'ajoutent les baisses de l'aide publique au développement de nombreux pays européens : 2 milliards d'euros en moins en France, 900 millions en Allemagne, mais aussi au Royaume-Uni, en Suède, en Suisse ou encore aux Pays-Bas.

Joël Weiler, Directeur Général de MdM fait le point.

De nombreux programmes humanitaires impactés

Ces décisions fragilisent des milliers de programmes dans plus de 140 pays, affectant des millions de bénéficiaires. « Concrètement, cela implique une limitation de l’accès aux soins proposé par les ONG médicales, l’impossibilité d’acheter des médicaments, de proposer des campagnes de vaccination ou encore de bénéficier de déplacements sécurisés », précise Joël Weiler, directeur de Médecins du Monde.

  • 95 millions de personnes

    privées de l’accès aux soins de santé primaire à cause de la suspension de l’USAID.

95 millions de personnes

privées de l’accès aux soins de santé primaire à cause de la suspension de l’USAID.

Les conséquences sont catastrophiques

La suspension de l’USAID a déjà privé à elle seule 95 millions de personnes de l’accès aux soins de santé primaire, ce qui pourrait entraîner 3 millions de décès par an. L’arrêt des programmes financés par l’aide américaine provoque 103 morts par heure, selon une chercheuse américaine.1 On estime que 11,7 millions de femmes et de jeunes filles n’ont pas eu accès aux soins contraceptifs rien que dans les 90 premiers jours de gel des financements américains, ce qui pourrait causer environ 4,2 millions de grossesses non désirées et 8 340 décès maternels. Autre répercussion dramatique : de graves perturbations dans la chaîne d’approvisionnement en médicaments contre le VIH a empêché de nombreuses cliniques de fournir la thérapie nécessaire à des millions de personnes.

Malgré la diversification des sources de financement de Médecins du Monde, plusieurs projets de l’association sont directement affectés par la suspension de l’USAID, notamment en République Démocratique du Congo, au Mali, en Colombie, à Madagascar, au Nigéria, au Myanmar, en Turquie, au Mexique et aux États-Unis.

En Syrie, 8 des 12 centres de santé soutenus par l’association au nord-ouest du pays ont été contraints de cesser leurs activités. «Au-delà des chiffres, c’est aussi une crise politique et une crise des valeurs, déplore Joël Weiler. Nous sommes face à une remise en question du rôle des associations, de la société civile et du rôle des ONG à l’international en particulier. » 

La survie d’un grand nombre d’ONG est mise en jeu et, plus grave encore, la survie des personnes qui bénéficient de l’aide de ces organisations.

Joël Weiler, Président de MdM

Alors que près de 305 millions de personnes ont besoin d’une aide d’urgence aujourd’hui, le déclin de l’aide internationale bouleverse tout le système de coopération et pourrait entraîner des choix politiques restrictifs.

La réflexion lancée par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) des Nations Unies pour concentrer les financements disponibles en priorité vers les contextes humanitaires les plus critiques pourrait notamment invisibiliser des situations de vulnérabilité qui s’aggraveraient très rapidement face à l’absence totale de réponse humanitaire. « C’est toute l’architecture humanitaire qui est en train de s’écrouler, insiste Joël Weiler. La survie d’un grand nombre d’ONG est mise en jeu et, plus grave encore, la survie des personnes qui bénéficient de l’aide de ces organisations. Nous sommes face à une crise humanitaire et devons plus que jamais rester solidaires. »