Christian, Référent migration, droits et santé

© Anaïs Oudart

Le débat parlementaire a été houleux, les tractations politiciennes féroces, mais la loi « Asile et immigration », partiellement censurée par le Conseil d’État, a été promulguée. Une loi qui ostracise et menace l’accès aux soins des exilés. Si l’aide médicale d’État (AME), un temps menacée, n’est pas supprimée, elle doit encore être réformée. Une aberration en termes de santé publique pour Christian Reboul, référent migration, droits et santé de Médecins du Monde.

Cette loi, c’est une machine à précariser, à fragiliser plus encore des personnes qui le sont déjà.

Quelle est la position de Médecins du Monde sur la loi immigration ?

Il faut savoir qu’à l’origine, le projet de loi « Asile et immigration » ne comportait pas de mesures de santé. Des dispositions ont été introduites par voie d’amendement au Sénat afin notamment de transformer l’AME en aide médicale d’urgence, en restreignant fortement le panier de soins. Pour le moment l’AME n’a pas été supprimée mais il existe bien d’autres dispositions qui viennent créer un contexte de crainte qui va impacter la vie quotidienne des personnes étrangères. Cette loi, au final, c’est une machine à précariser, à fragiliser plus encore des personnes qui le sont déjà.

Quels sont les risques pour la santé de nos publics ?

La loi n’a pas touché à l’AME et on peut considérer que c’est une victoire collective. Médecins du Monde a joué un rôle certain pour mobiliser le monde de la santé, le monde médical, les associations, les politiques, pour venir contrer cette idée d’aide médicale d’urgence qui fermait les portes de la médecine de ville aux personnes malades pour les envoyer vers les urgences. C’était un non-sens en termes de santé des personnes, mais aussi de santé publique. Cela a été évité dans un premier temps mais l’histoire n’est pas finie parce qu’au cours des tractations, il y a eu un engagement du gouvernement à réouvrir le débat sur l’aide médicale d’État en 2024. Et ça veut dire qu’il va falloir se remobiliser.

Quel avenir pour l’AME ?

Le système de l’AME n’est pas parfait mais il a le mérite d’exister. Nous poussons pour que les bénéficiaires de l’AME soient intégrés au régime général de la Sécurité sociale. Mais on en est loin. Le rapport remis au gouvernement en décembre, pour lequel Médecins du Monde a été auditionné, présente des aspects positifs en rejetant par exemple l’idée nauséabonde d’un appel d’air créé par l’offre de soins en France sur les candidats à la migration. Mais il suggère aussi que l’AME serait un ressort de la permanence des personnes en situation irrégulière sur le territoire et propose de la limiter dans le temps, ce qui créerait des ruptures de soins. Alors oui, le climat n’est pas favorable. Mais on va se battre !